Dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé, le donneur d’ordre peut voir sa responsabilité engagée s’il ne s’est pas assuré du respect, par son sous-traitant, des règles du droit du travail. Ainsi, toute personne qui conclut un contrat portant sur un montant d’au moins 5 000 € HT doit vérifier, lors de la conclusion du contrat et tous les 6 mois jusqu’à la fin de l’exécution du contrat, que son sous-traitant a effectué toutes les formalités et démarches légales. À défaut le donneur d’ordre sera tenu solidairement responsable du paiement des diverses sommes réclamées à son sous-traitant pour travail dissimulé.
Les personnes concernées
Sont soumis à cette obligation de vigilance, les particuliers et les professionnels, personnes physiques ou morales, de droit privé ou public, dès lors qu’ils se placent en situation de donneur d’ordre.
Une entreprise est un donneur d’ordre lorsqu’elle confie à une autre entreprise, le sous-traitant, le soin d’exécuter pour elle, selon un cahier des charges préétabli, des activités de production ou de service dont elle conserve la responsabilité.
L’entreprise sous-traitante, quant à elle, reste responsable des moyens humains et matériels mis en œuvre pour la réalisation des travaux qui lui sont confiés. En contrepartie le sous-traitant perçoit une rémunération fixée forfaitairement pour la prestation réalisée.
Les opérations concernées
Sont concernés les contrats portant sur l’exécution d’un travail, la fourniture d’une prestation de services ou l’accomplissement d’un acte de commerce : contrats de production, de fabrication, de transformation, de réparation, de construction, de fourniture, de vente, de travaux agricoles, de prestations de services, matérielles, intellectuelles ou artistiques, de transport, de sous-traitance industrielle ou de travaux.
L’obligation de vigilance concerne les contrats d’un montant au moins égal à 5 000 € HT. Il convient de prendre en considération le montant global de l’opération, même si celle-ci fait l’objet de plusieurs paiements ou facturations.
L’obligation de vigilance du donneur d’ordre
Le donneur d’ordre doit se faire remettre par son sous-traitant, lors de la conclusion du contrat et tous les 6 mois jusqu’à la fin de son exécution un certain nombre de documents. Il doit vérifier la cohérence des informations dont il dispose au vu des documents remis.
L’attestation de vigilance
Le donneur d’ordre doit se faire remettre par son sous-traitant, une « attestation de vigilance » : attestation de fourniture des déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions de Sécurité sociale. Cette attestation est délivrée au sous-traitant par l’URSSAF (ou la MSA).
Cette attestation mentionne également le nombre de salariés et le total des rémunérations que le sous-traitant a déclaré lors de sa dernière échéance. Ces informations doivent permettre au donneur d’ordre d’apprécier l’adéquation entre le nombre de salariés déclarés et l’ampleur du travail confié.
Le donneur d’ordre doit s’assurer de l’authenticité de l’attestation de vigilance fournie par le sous-traitant. Ce contrôle s’effectue auprès de l’organisme de recouvrement compétent, par voie dématérialisée, sur le site Internet de l’organisme (URSSAF, MSA ou Sécurité sociale des indépendants), en saisissant le numéro de sécurité mentionné sur l’attestation.
Les autres documents
Lorsque l’immatriculation du sous-traitant au Registre du commerce et des sociétés ou au Répertoire des métiers est obligatoire ou lorsqu’il s’agit d’une profession réglementée, le donneur d’ordre doit également se faire remettre l’un des documents suivants :
- Un extrait de l’inscription au Registre du commerce et des sociétés,
- Une carte d’identification justifiant de l’inscription au Répertoire des métiers,
- Un devis, un document publicitaire ou une correspondance professionnelle, à condition qu’y soient mentionnés le nom ou la dénomination sociale, l’adresse complète et le numéro d’immatriculation au Registre du commerce et des sociétés ou au Répertoire des métiers ou à une liste ou un tableau d’un ordre professionnel, ou la référence de l’agrément délivré par l’autorité compétente,
- Un récépissé du dépôt de déclaration auprès d’un centre de formalités des entreprises pour les personnes au cours d’inscription.
En cas d’emploi de travailleurs étrangers
Si le sous-traitant emploie des travailleurs étrangers, il doit communiquer au donneur d’ordre, la liste nominative des salariés étrangers employés en précisant pour chacun : sa date d’embauche, sa nationalité, le type et le numéro du titre valant autorisation de travail.
Sous-traitant établi à l’étranger
Lorsque le sous-traitant est établi à l’étranger, il doit fournir au donneur d’ordre :
- Son numéro de TVA intracommunautaire ; Si le cocontractant n’est pas tenu d’avoir un tel numéro, un document mentionnant son identité et son adresse ou, le cas échéant, les coordonnées de son représentant fiscal ponctuel en France,
- Un document attestant de la régularité de sa situation à l’égard du règlement européen portant sur la coordination des systèmes de Sécurité sociale, ou d’une convention internationale de Sécurité sociale (formulaire « A1 »),
- Un document de l’organisme chargé du régime social obligatoire mentionnant que le sous-traitant est à jour de ses déclarations sociales et du paiement des cotisations afférentes, ou un document équivalent,
- Lorsque l’immatriculation du sous-traitant à un registre professionnel est obligatoire dans le pays d’établissement, un document justifiant de cette immatriculation.
Le devoir d’injonction
Le donneur d’ordre qui est informé par écrit par un agent de contrôle, un syndicat, une association professionnelle ou une institution représentative du personnel, de l’intervention d’un sous-traitant ne respectant pas les obligations d’interdiction de travail dissimulé, doit lui enjoindre aussitôt, par lettre recommandée avec avis de réception, de faire cesser sans délai cette situation. Il en est de même en cas d’emploi d’un travailleur étranger sans titre de travail.
À défaut, le donneur d’ordre est tenu solidairement responsable.
La solidarité financière
Les cas de mise en œuvre
Le mécanisme de solidarité financière avec un sous-traitant qui a fait l’objet d’un procès-verbal pour travail dissimulé peut être appliqué à plusieurs titres :
- En tant que donneur d’ordre qui a manqué à ses obligations de vigilance,
- En tant que donneur d’ordre condamné pour avoir eu recours sciemment aux services de l’auteur de l’infraction de travail dissimulé,
- En tant que donneur d’ordre averti et qui n’a pas fait cesser l’infraction (devoir d’injonction),
- En tant que société mère ou holding.
L’étendue de la solidarité financière
Dans ces cas, le donneur d’ordre sera tenu solidairement responsable avec le sous-traitant :
- Au paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires dus au Trésor et aux organismes de protection sociale, y compris pénalités et majorations,
- Au paiement des rémunérations et charges dues au titre de l’emploi de travailleurs dissimulés,
- Au remboursement, le cas échéant, des sommes correspondant au montant des aides publiques dont le sous-traitant a bénéficié.
De plus, lorsqu’un donneur d’ordre a manqué à ses devoirs de vigilance ou d’injonction vis-à-vis d’un sous-traitant ayant exercé un travail dissimul, l’organisme de recouvrement procède à l’annulation des réductions ou exonérations de cotisations dont le donneur d’ordre a pu bénéficier au titre des rémunérations versées à ses salariés. L’annulation s’applique pour chacun des mois au cours desquels le donneur d’ordre n’a pas respecté ses obligations, dans la limite de 15 000 € pour une personne physique et 75 000 € pour une personne morale.
En cas d’emploi de travailleurs étrangers
Si le donneur d’ordre n’a pas vérifié que sons sous-traitant s’acquitte de ses obligations relatives à l’emploi de travailleurs étrangers, il sera tenu solidairement au paiement :
- Des salaires et accessoires dus au salarié étranger non autorisé à travailler,
- De l’indemnisation liée à la rupture de la relation de travail,
- De la contribution spéciale du donneur d’ordre en cas d’emploi irrégulier de travailleurs étrangers peut d’ajouter, le cas échéant, à la solidarité financière prévue en cas de travail dissimulé.